Trêve hivernale : tout ce qu’il faut savoir

Blandine Rochelle
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La trêve hivernale est une mesure légale, qui suspend les expulsions locatives durant les mois les plus froids de l'année. Elle vise à protéger les occupants en situation de difficulté, en empêchant les propriétaires de mettre fin à leur bail par une expulsion. Instaurée depuis plusieurs décennies, la trêve hivernale s'étend du 1er novembre au 31 mars, période durant laquelle les expulsions sont théoriquement interdites. Cependant, des exceptions existent. Pour les locataires comme pour les propriétaires, il est essentiel de connaître les droits et devoirs des uns et des autres.

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La trêve hivernale s'étend du 1er novembre au 31 mars et concerne une majorité de locataires. © AntonioGuillem - Getty images
La trêve hivernale s'étend du 1er novembre au 31 mars et concerne une majorité de locataires. © AntonioGuillem - Getty images
Sommaire

Les exceptions à l'application de la trêve hivernale

Bien que la trêve hivernale protège les locataires d'une expulsion durant l'hiver, certaines situations permettent tout de même de déroger à cette règle. Encadrées par la loi, ces exceptions sont listées dans l’article L411-1 du Code des procédures civiles d'exécution. Les cas concernés sont les suivants :

  • Relogement adapté : si un relogement adapté au locataire et à sa famille est prévu, l’expulsion peut avoir lieu, même pendant la trêve hivernale.
  • Logements étudiants : les résidents de logements étudiants, comme les résidences CROUS, peuvent être expulsés, si une décision du tribunal administratif le permet.
  • Mauvaise foi du locataire : si le juge a explicitement indiqué que le locataire est de « mauvaise foi », l’expulsion peut être envisagée. Ce peut être le cas, par exemple, d'un locataire qui ne paie pas volontairement son loyer, malgré des capacités financières,
  • Intrusion illégale : si un individu a occupé un logement sans droit ni titre, en ayant utilisé des moyens, tels que des menaces, des manœuvres ou la violence, l'expulsion est possible, à condition que le juge l’ait expressément mentionné dans sa décision.
  • Violences conjugales : les situations de violence dans le couple, que ce soit à l’encontre d’un partenaire ou d’un enfant, justifient l’expulsion du conjoint violent du domicile familial pour protéger les victimes. Cette expulsion est ordonnée par le juge aux affaires familiales.
  • Procédures de divorce : dans le cadre d’une procédure de divorce, le juge aux affaires familiales peut ordonner l’expulsion de l’un des époux du domicile conjugal, y compris pendant la trêve.
  • Locaux dangereux : si un arrêté de mise en sécurité est pris pour des locaux en péril, une évacuation peut être effectuée à tout moment de l’année pour des raisons de sécurité. Dans ce cas, des solutions de relogement ou d'hébergement doivent être proposées.

Les droits du locataire durant la trêve hivernale

Durant la trêve hivernale, le locataire bénéficie d'une protection accrue contre les expulsions. Voici les droits dont il dispose :

  • Interdiction de l’expulsion : en dehors des exceptions mentionnées précédemment, aucune expulsion ne peut être réalisée entre le 1er novembre et le 31 mars, même si une décision de justice en faveur de l’expulsion a été rendue. Le commissaire de justice ne peut pas intervenir pour procéder à une expulsion durant cette période.
  • Coupures d’énergie : pendant la trêve hivernale, les coupures d’électricité, de gaz et d'eau sont interdites dans les résidences principales, même en cas de factures impayées. Les fournisseurs peuvent toutefois réduire la puissance de l’électricité, sauf pour les bénéficiaires du chèque énergie. Si un bailleur coupe l’énergie durant cette période, le locataire est en droit de déposer une plainte.
  • Procédure d’expulsion : en cas de non-paiement de loyer, le propriétaire peut tout de même entamer ou poursuivre une procédure d’expulsion pendant la trêve, mais l’exécution de cette expulsion sera suspendue jusqu’à la fin de la période de trêve. De plus, le locataire peut solliciter un délai auprès du juge de l'exécution pour éviter l'expulsion immédiate.

Si le bail est résilié, le propriétaire peut transmettre un commandement de quitter les lieux. Une fois cette période de trêve hivernale écoulée, un commissaire de justice pourra procéder à une tentative d’expulsion. Si le locataire ne coopère pas ou est absent, le commissaire dressera un procès-verbal de tentative d’expulsion ou de difficulté. Le propriétaire pourra ensuite demander le concours de la force publique à la préfecture.

Les droits du propriétaire durant la trêve hivernale

Malgré la suspension des expulsions pendant la trêve hivernale, les propriétaires ne sont pas totalement démunis et disposent de certains droits :

  • Procédure d'expulsion : les propriétaires peuvent engager ou poursuivre une procédure d’expulsion, en saisissant le juge, pendant la trêve hivernale. Si une décision d’expulsion est rendue, son application sera simplement reportée à la fin de la trêve.
  • Exceptions spécifiques : en cas de non-respect de l'une des règles fondamentales, comme l'occupation illicite, la violence ou l’obligation de relogement, les propriétaires peuvent faire valoir les exceptions pour obtenir une dérogation à la trêve hivernale, et ainsi récupérer le logement.
  • Commandement de payer : en cas de loyers impayés, le propriétaire est en droit d'envoyer un commandement de payer au locataire. Si ce dernier ne régularise pas sa situation dans un délai de deux mois, le propriétaire pourra initier une procédure d’expulsion. La trêve ne bloque donc pas la procédure, mais seulement l’expulsion elle-même.

Les sanctions en cas de non-respect de la trêve hivernale

Le non-respect de la trêve hivernale peut entraîner des sanctions sévères pour le propriétaire. Expulser un locataire pendant cette période, sans respecter les procédures, constitue un délit, passible de sanctions pénales. Le propriétaire qui enfreint la trêve hivernale risque jusqu’à trois ans d’emprisonnement et une amende pouvant atteindre 30 000 €. Cette sanction vise à décourager toute tentative de contrainte illicite durant la trêve. En cas d’expulsion sans respect de la procédure légale, le locataire peut porter plainte pour expulsion illégale, ce qui exposera le propriétaire à des poursuites pénales et civiles.

La trêve hivernale et les squatteurs

Depuis l’adoption de la loi ELAN, les squatteurs ne bénéficient plus de la protection de la trêve hivernale. Lorsqu’une occupation sans droit ni titre est constatée, les délais d’expulsion sont plus courts. Cela permet ainsi au propriétaire de récupérer son bien plus rapidement. Les procédures spécifiques pour expulser un squatteur sont simplifiées, même si le recours à la justice reste nécessaire pour garantir un traitement légal de la situation.

Durant la trêve hivernale, ce sont les expulsions qui sont suspendues, pas les procédures.

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