Le mois dernier, les taux de crédit ont dépassé les 3 %. Du jamais vu depuis dix ans ! Ces taux plombent-ils vraiment votre projet d'achat immobilier ? On décrypte la situation.
En 18 mois, les taux de crédit sont passés de 1% à 3,15%
Tout le monde en parle. Depuis 18 mois, on assiste à une remontée des taux d’intérêt. Une remontée fulgurante même. Selon l’Observatoire Crédit Logement/CSA, en avril 2023, le taux moyen des crédits était de 3,15 %. Alors que début 2022, on pouvait encore emprunter autour de 1 %. Et ce n’est pas fini. De nombreux observateurs pensent que d’ici l’été 2023, les taux auront dépassé les 4 % pour un emprunt sur 20 ans. Un "scénario catastrophe" annoncé dès septembre dernier par l'équipe data-science de Meilleurs Agents dans son baromètre de rentrée.
Relativisons un instant. Car les Français ne sont pas les plus mal lotis. Dans d’autres pays d’Europe où les taux d’intérêt sont variables, le coût du crédit s’est carrément envolé. Ce qui a pour conséquence une chute vertigineuse des prix de l’immobilier. À l'instar de la Suède où ils ont baissé en moyenne de 17 %, selon la société publique de prêts immobiliers SBAB.
En France, les prix de l’immobilier baissent peu : -0,1% en moyenne sur les trois derniers mois, selon Meilleurs Agents. Pas suffisamment donc pour que les acquéreurs s’y retrouvent.
Le nombre de prêts accordés a chuté de 40%
Le 4 mai, la BCE a de nouveau relevé ses taux directeurs afin de contenir l’inflation. Cette nouvelle hausse de 25 points n’est pas sans conséquences sur la hausse des taux immobiliers appliqués par les banques commerciales. Et donc sur le coût du crédit. Le durcissement monétaire des banques centrales pour freiner l’inflation a raison du marché du crédit.
Toujours selon l’Observatoire Crédit Logement/CSA « le nombre de prêts accordés a chuté de 40,6 % sur une période d’un an, confirmant une tendance à la baisse pour les crédits immobiliers ».
Pour devenir propriétaire, les particuliers doivent revoir leurs prétentions à la baisse. Lorsqu’ils n’abandonnent pas tout bonnement leur projet d’achat. Le 6 mars, la Banque de France annonçait ainsi la chute du pouvoir d’achat immobilier des Français. Environ 12 m² de surface en moins. Soit une chambre ou un bureau sacrifié(e) !
Le marché du neuf se grippe
La hausse des taux immobiliers conjugué à l’inflation actuelle agit négativement sur le pouvoir d’achat des Français. Mécaniquement, la demande de biens régresse. Les ménages modestes sont les plus impactés car leur capacité d’emprunt est mise à mal.
Concernant l’offre de logement, ça fait un moment déjà qu’elle est en souffrance. À cause notamment de l’explosion des coûts des matières premières suite à la guerre en Ukraine. À cause aussi des permis de construire donné au compte-goutte dans certaines agglomérations. Et plus récemment, à cause de la hausse des taux d’intérêt.
Du côté du neuf, la profession est largement touchée et certains promoteurs ont même décidé de suspendre la construction de nouveaux logements car ils ne rentrent plus dans leur frais. De plus, la demande en baisse ne leur permet plus d’assurer les 80 % de réservations nécessaires au lancement des chantiers. Le marché semble se gripper…
Les professionnels dénoncent une "crise du pouvoir d'habiter"
Début mai, les professionnels de l’immobilier adressaient une lettre ouverte au président Emmanuel Macron. Lettre dans laquelle ils tiraient la sonnette d’alarme sur l’état du logement en France et sur la bombe économique et sociale qu’est la « crise du pouvoir d’habiter ».
En 2022, 375 000 logements ont été construits en France. Il en faudrait 500 000 par an pour sortir de la crise du logement. De son côté, la Fondation Abbé-Pierre fait état de 4 millions de personnes mal-logées dans le pays. C’est 100 000 de plus en un an !
Si le tableau n’est pas des plus gais en ce printemps 2023, tout n’est pas noir pour autant. Des baisses de prix plus significatives dans certains secteurs devraient en effet permettre au marché de retrouver un équilibre. Et déjà, les acheteurs reprennent la main, avec plus de pouvoir de négociation sur les prix.
De plus, les pouvoirs publics qui ont un rôle à jouer, ont la capacité d’intervenir. En assouplissant, par exemple, les contraintes qui pèsent sur les banques pour fluidifier le marché du crédit. C’est dans leur intérêt, et dans l’intérêt de tous. Car comme dit l’adage : « Quand l’immobilier va, tout va. »
Quid du marché locatif ?
On n’y pense pas nécessairement. Mais la hausse des taux d’intérêt a aussi des effets sur le marché locatif. Parce que certains acquéreurs n’ayant plus accès au crédit se reportent sur le marché de la location déjà tendu dans certaines zones. Et parce que les investisseurs rencontrent eux aussi des difficultés. Ils participent pourtant au renouvellement du marché locatif...
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