Colocation solidaire : et si vous emménagiez avec des sans-abris ?

Karin Scherhag
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Douze maisons solidaires en France. 250 colocataires. De la générosité. De la fraternité. Des leçons de vie. Et des happy ends. Lazare, c’est l’association qui change des vies en réunissant jeunes actifs et sans-abris. 

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Lazare fait cohabiter jeunes actifs et sans-abris
Une maison Lazare accueille plusieurs colocations, un appartement pour la famille responsable et des espaces communs ©Getty
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Lazare fait cohabiter jeunes actifs et sans-abris

C’est un post sur LinkedIn publié il y a quelques semaines qui a retenu notre attention. Une famille française qui s’était expatriée plusieurs années en Colombie était de retour en France. À Montpellier. Après avoir longtemps cherché un projet de vie à partager en famille - humanitaire ? - les parents avaient découvert Lazare. Une association qui achète des maisons pour les transformer en appartements solidaires où cohabitent des jeunes actifs et des sans-abris. La famille en question s’était lancée les yeux fermés. 

Et forcément, un tel projet de vie nous a interpellés. On a donc voulu en apprendre davantage sur cette association qui fait du bien. Depuis sa création en 2006, Lazare a déjà ouvert une douzaine de maisons en France. Neuf projets sont aussi en cours ou à l’étude. Et les maisons Lazare s’exportent : en Belgique, en Suisse, au Royaume-Uni, en Espagne et même… au Mexique ! Plus de 250 personnes partagent aujourd’hui ce mode de vie aussi atypique que bénéfique. 

L’association rénove ses maisons solidaires grâce à des levées de fonds. Pour participer, ça se passe sur le site de Lazare.

Besoin de relations humaines

Et ça marche ? Eh bien OUI. Selon les données communiquées par l’asso, 98% des colocs se sentent acceptés tels qu'ils sont aujourd'hui alors qu'ils n'étaient que 15% avant Lazare. 85% des colocs disent avoir aujourd'hui un projet personnel ou professionnel, contre 25 % avant. Enfin, 85% d’entre eux quittent la coloc Lazare au bout de deux ans pour un logement pérenne. Ça, c’est pour les chiffres. 

Côté humain, les témoignages des colocataires sont aussi divers que bouleversants. Des enfances difficiles ou des accidents de parcours qui les ont tous conduits à la rue. Parfois pendant de très longues années. Et puis… Et puis un jour, la lumière au bout du tunnel. Une lumière baptisée Lazare. Plus qu’un toit sur la tête, un havre pour se reconstruire. Retrouver confiance en soi. Reprendre sa vie en main. Réapprendre à vivre, tout simplement. “Les personnes de la rue ont surtout besoin de relations humaines”, affirme Loïc Luisetto, ancien directeur général et membre de l’asso pendant onze ans. 

Une coloc presque comme les autres

Une coloc Lazare, ça ressemble presque à n’importe quelle coloc. D’ailleurs ici, tout le monde paie un loyer. Principale différence avec une colocation classique, la présence dans chaque maison d’une famille responsable du lieu. Les parents travaillent, les enfants sont scolarisés. Classique. Mais au lieu de vivre à 3, 4 ou 5, les membres de la famille partagent leur quotidien avec une dizaine d’autres personnes. Organisent des soirées le vendredi. Des week-ends et des vacances tous ensemble. Veillent à l’intégration des nouveaux venus. Et à l’harmonie du lieu. Les familles responsables s’engagent aussi pour trois ans. “On nous avait dit : “vous êtes fous de faire ça avec des enfants !”, racontent Solenne et Jean, responsables à Nantes. En école de commerce, on nous avait appris que pour attirer le succès, il fallait s’entourer de personnes à succès. Lors de notre arrivée à Lazare, on s’est pris une marée de misère humaine. Et on a tellement appris ! Les colocs sont devenus notre famille. On partage nos joies, nos galères… On avait compris que pour que nos enfants soient bien, il fallait leur trouver une nounou qui parle quatre langues. Mais nos enfants côtoient Manu, Fredo, Cédric. C’est eux qu’ils invitent à leur anniversaire avant leurs copains. Ils ont une ouverture qu’aucune école bilingue ne peut offrir.

Happy ends

Lazare, c’est donc aussi des happy ends comme on aimerait en lire plus souvent. On ne connaît pas Patrick mais on se réjouit de sa nouvelle vie de pâtissier en Irlande. Patrick c’est un mec qui en veut. Inscrit au CAP pâtisserie en candidat libre alors qu’il était sans domicile et n’avait aucun ustensile à dispo, il avait décroché le précieux sésame. Et après six ans dans la rue, Patrick avait posé son sac dans la coloc Lazare de Nantes. Après, les bonnes nouvelles et les belles rencontres se sont enchaînées pour lui. Jusqu’à décrocher un emploi dans une pâtisserie française en Irlande. Ses anciens colocataires sont, eux, “partagés entre la tristesse de le voir nous quitter, la joie de savoir qu’il va enfin réaliser son rêve… et le soulagement de pouvoir arrêter de grossir !” 

Mélissa, 6 ans, est l’une des plus jeunes colocs Lazare. Et on a voulu lui donner le mot de la fin : “Je vis en colocation avec ma famille et des personnes qui vivent à la rue. Et ça se passe très bien parce que maintenant, ils sont mieux dans leur cœur, ils ont plus de joie.

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