Boom des zones rurales, record de transactions, hausse des prix… Thomas Lefebvre, le directeur scientifique de Meilleurs Agents, fait le bilan de l’année immobilière écoulée. Et dresse les perspectives de cette nouvelle année qui commence.
Le marché immobilier semble résister à tout, y compris à la crise sanitaire. Quel bilan tirez-vous de l’année 2021 ?
On a assisté à une euphorie immobilière, tant en termes de prix que de volume de ventes. Avec un nouveau record de transactions dans l’ancien : 1,198 million de ventes sur l’année 2021, soit 12% de plus qu’en 2019. Le marché immobilier fait plus que résister à la crise sanitaire, il en profite. Et il est aidé en cela par des conditions de financement toujours très favorables. Autre record à noter cette année : après une augmentation de 5% en un an, le prix moyen en France dépasse désormais les 3 000 €/m², ce qui n’était jamais arrivé.
Et pour la première fois aussi, cette augmentation n’est pas liée aux grandes agglomérations mais est la conséquence de l’attractivité nouvelle des territoires péri-urbains, des villes moyennes et des zones de résidences secondaires. Les grandes métropoles ont perdu leur rôle de locomotives du marché. Dans les dix plus grandes villes de France (hors Paris), on observe ainsi une hausse des prix de 4,4% sur l’année 2021. C’est convenable mais on s’était habitué à beaucoup mieux. En 2020, les prix avaient par exemple augmenté de 7% et même de 9,2% un an plus tôt. En comparaison, les prix dans les zones rurales ont bondi de 8,3% depuis le mois de janvier 2021.
La nouvelle géographie immobilière que vous observez depuis la rentrée se confirme donc ?
Oui et j’y vois une réponse des Français à la crise sanitaire. Ils expriment leur besoin de changement et sont, pour cela, à la recherche d’un nouveau cadre de vie, de plus d’espace, de verdure. Plusieurs grandes villes marquent le pas : Nantes, Strasbourg, Lille… Mais c’est Paris qui illustre le mieux ce désamour pour les grands centres urbains. Dans la capitale, les prix de la pierre flirtent ces derniers mois avec les 10 300 €/m² alors qu’il y a un peu plus d’un an, ils frôlaient les 11 000 €/m².
Preuve encore de ce besoin d’espace des Français, l’intérêt grandissant des acheteurs pour les maisons. Depuis un an, leur prix a augmenté deux fois plus vite que celui des appartements alors que leur progression était assez similaire jusqu’à présent.
Pourquoi cette revanche des villes moyennes est-elle si spectaculaire ?
Parce que ce rééquilibrage du territoire vient en rupture avec tout ce qu’on a connu depuis les années 2000. Jusqu’à présent, tout était concentré dans les grandes villes. Les nouvelles règles de travail permettent aux Français de s’éloigner des grands centres urbains mais pour que la mayonnaise prenne vraiment, il faudra penser le logement dans une démarche globale : rénovation du bâti, services et commerces de proximité, infrastructures, mobilité… Si les pouvoirs publics décident d’accompagner cette mutation, ce peut être une bonne nouvelle pour des territoires longtemps abandonnés.
Dans ce contexte, comment s’annonce 2022 ?
Le marché immobilier devrait continuer à bien se porter pour plusieurs raisons. D’abord parce que même si la pandémie n’est pas encore dernière nous, on a constaté que l’immobilier ne connaissait pas la crise sanitaire et que l’économie ne s’effondrait pas.
D’autre part, les taux d’intérêt devraient rester bas. La Banque centrale européenne continue en effet à dire qu’elle laissera les vannes du crédit grandes ouvertes en France.
Enfin, le marché de l’emploi est plutôt sur une dynamique positive : on est revenu à un taux de chômage de 8%, comme avant le début de la crise sanitaire, mais avec une population active plus importante. Le taux d’emploi est donc à son plus haut niveau depuis 1975 et les embauches en CDI augmentent.
Pour les acheteurs, tous les signaux sont au vert. Mieux encore, les taux bas couplés à une inflation en hausse permettent de gagner de l’argent en empruntant. Ce qui devrait convaincre de nombreux acquéreurs potentiels malgré les échéances électorales qui poussent traditionnellement les candidats à la propriété à un certain attentisme.
Il faudra néanmoins attendre le printemps, saison cruciale pour l’immobilier, pour savoir si la désaffection des acquéreurs pour les grandes métropoles se confirme.
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